Otto Finsch – Kaiserin Augusta Fluss – 1885

Lors de ma présentation d’octobre 2018 consacrée au tourisme dans la région du Sepik, j’ai évoqué brièvement plusieurs expéditions menées au cours du XXe siècle. Ces missions ont permis de recueillir des données ethnographiques sur des populations parfois rencontrées pour la première fois par des Occidentaux, tout en rassemblant de nombreux objets culturels. Une grande partie de ces artefacts est aujourd’hui conservée dans des musées européens, notamment en Allemagne, en raison du passé colonial de la région du Sepik, intégrée au territoire du Kaiser Wilhelms Land, sous domination allemande de 1884 à 1919.

Ce contexte historique m’a servi, en introduction, de point d’ancrage pour mettre en lumière certaines figures marquantes — explorateurs, anthropologues, naturalistes, géographes, directeurs de musées — ainsi que des ouvrages et des collections ethnographiques, plus ou moins connues du grand public.

Je propose ici une sélection de faits saillants issus de ces récits foisonnants de collecteurs en Papouasie-Nouvelle-Guinée au XXe siècle, enrichie de quelques digressions éclairantes sur l’histoire des collections.

Otto-Finsch-and-Tapinowanne-Toron

Le premier de ces personnages est Friedrich Hermann Otto Finsch.
Otto Finsch est à la base un naturaliste et une première expérience d’ornithologue en Bulgarie lui permet d’obtenir un poste de conservateur au musée d’histoire naturelle de Leiden de 1862 à 1865. Passé conservateur au musée de Brême, il quitte son poste en 1878 et voyage dans le Pacifique sud en compagnie de son épouse.  
En 1884, il est en Nouvelle-Guinée en tant que commissaire impérial. Il est en effet l’un de ces négociateurs allemands pour l’annexion de la région nord-est l’île, de la Nouvelle-Bretagne, de la Nouvelle-Irlande, du Nord des Salomon et autres petites îles qui semblent n’intéresser aucune des grandes puissances. Les tractations sont rapides et ces territoires passent rondement sous protectorat allemand, les principales régions étant la Kaiser Wilhelms Land et l’archipel de Bismarck.
À l’époque, la Deutsch Neu Guinea Company était un consortium représentant de puissants intérêts financiers et commerciaux allemands et gérait tout : l’économie i.e les plantations et le recrutement de la main-d’œuvre, la recherche géographique et naturaliste, la communication par bateaux, la santé…
Et c’est elle, par l’intermédiaire de son directeur Adolf von Hansemann, qui va lancer l’expédition sur le Sepik, avec à sa tête Otto Finsch. Celle-ci sera menée à des fins de collecte pour la propagande de la Compagnie. Hansemann imagine en effet une grande salle dédiée aux objets, “Propriété de la Neu Guinea Company” dans le nouveau musée ethnographique de Berlin qui doit être inauguré en 1886.
Mais Adolf Bastian, son premier directeur, ne l’entend pas de cette façon et le musée devra acheter fort cher à Hansemann les quelques 2000 objets collectés par Finsch ; la Neu Guinea Company venant ainsi de comprendre l’intérêt commercial des artefacts ethnographiques.
Mais revenons à 1885…
L’expédition elle même sur le Sepik est somme toute modeste : Finsch remonte le fleuve depuis son embouchure sur une distance d’environ 50 kms à bord du vapeur Samoa. (Ce même vapeur qui repartira l’année suivante, sous le même commandement (capitaine Dallmann) avec des buts géographiques et surtout beaucoup plus en amont).
C’est Finsch qui donnera au fleuve Sepik le nom de Kaiserin Augusta Fluss en l’honneur de l’épouse du Guillaume, l’impératrice Augusta.

Planche-dessins-finsch

Outre son rôle de simple collecteur d’objets, Otto Finsch était un excellent illustrateur : Son ouvrage sur ses objets déposés au museum d’histoire naturelle de Vienne Ethnologische Erfahrungen und Belegstücke aus der Südsee : Beschreibender Katalog einer Sammlung sera publié en 1893 et fournit de nombreux et précieux dessins.


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Planche-finsch

Les collections du Weltmuseum de Wien sont ainsi riches de 26 carnets de voyage, de nombreux manuscrits, de croquis et de dessins au crayon de couleur, ainsi que d’une belle collection d’artefacts recueillis en Micronésie lors des voyages de Finsch des années 1880 puis en Papouasie notamment en 1884.
C’est ce que nous avons pu apercevoir dans les vitrines du museum lors du voyage de l’association en avril dernier à Vienne.

Sources :
Bushmann Rainer F., 2009, Anthropology’s Global Histories – The Ethnographic Frontier in German New Guinea 1870-1935, University of Hawai’i Press.
O’Hanlon & Welsch Robert L., 2000, Hunting the Gatherers. Ethnographic Collectors, Agents and Agency in Melanesia, 1870-1930, Berghahn Books.


Photo 1 : Carte ©T.D.R
Photo 2 : Otto Finsch et Tapinowanne Toron, photo ©T.D.R.
Photo 3 et 4 : Planches de dessins d’Otto Finsch.
Photo 5 : Vitrines au Weltmuseum, Vienne, photo de l’auteure, 2018.

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