Comme une évidence…

La galerie Christian Berst dévoile sa nouvelle exposition intitulée Les habités, une rencontre entre l’art premier et l’art brut, à découvrir jusqu’au 26 octobre. Une convergence évidente, presque instinctive, tant les deux univers semblent faits pour dialoguer.

Les lecteurs assidus de ce blog le savent : j’ai souvent tissé des passerelles entre ces deux mondes, malgré les distances, les intentions divergentes, les origines lointaines. Car au-delà des formes et des fonctions, il y a parfois une même urgence à dire, à communiquer.

Dans La tête d’obsidienne, entretiens de 1937, Malraux rapportait ces paroles de Picasso : « Les masques, ils n’étaient pas des sculptures comme les autres. Pas du tout. Ils étaient des choses magiques. Et pourquoi pas les Egyptiens, les Chaldéens ? Nous ne nous en étions pas aperçus. Des primitifs, pas des magiques ! Les Nègres, ils étaient des intercesseurs, je sais le mot en français depuis ce temps là. Contre tout ; contre des esprits inconnus, menaçants…
Si nous donnons une forme aux esprits, nous devenons indépendants… J’ai compris pourquoi j’étais peintre….. Les Demoiselles d’Avignon ont dû arriver ce jour-là mais pas du tout à cause des formes : parce que c’était ma première toile d’exorcisme, oui !
»

C’est précisément cette idée que semblent prolonger les commissaires Daniel Klein et Antoine Frérot en nommant leur exposition Les habités. Car ce qui relie ces œuvres, c’est bien cette intensité de la présence, une énergie qui les traverse et les rend vivantes, comme si elles étaient animées par quelque chose.

Ce qui les caractérise est de l’ordre d’une nécessité intérieure. Elles ne cherchent pas à représenter le monde. L’oeuvre peut-être réceptacle d’une voix intérieure ou de celle d’un ancêtre, d’un esprit de la forêt ou d’une divinité de la mer…

J’évite à dessein les termes aux connotations trop vastes ou ambivalentes, comme « sacré » ou « indicible ». Ce qui se joue ici me semble appartenir davantage au registre du corps, à une énergie vive qui circule, qui déborde parfois. La matière, lorsqu’elle est entre les mains de l’artiste, peut en devenir le vecteur — à condition qu’il parvienne à la canaliser. Qu’il soit considéré comme fou, primitif, mystique… ou simplement « autre », c’est cette capacité à faire passer l’élan vital dans la forme qui m’interpelle.

Photos prises lors de l’exposition Les habités, septembre 2025

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